Diversité et inclusion : maintenons le cap !

“Ces dernières semaines, un épisode diplomatique aussi surprenant qu’inquiétant a rappelé combien les questions de diversité et d’inclusion dépassent le simple champ de la politique RH. Fin mars, plusieurs entreprises françaises ont reçu un courrier de l’administration américaine leur demandant de renoncer à leurs politiques DEI (diversité, équité, inclusion) pour continuer à accéder aux appels d’offres fédéraux. Une pression politique qui prend la forme d’un formulaire à signer, où il est demandé de certifier que l’entreprise n’applique aucune politique active de lutte contre les discriminations.

Cette tentative d’ingérence dans nos modèles sociaux et économiques a immédiatement suscité une réaction ferme de l’État français, de ses représentants économiques, mais également du monde de l’entreprise lui-même. Patrick Martin, le Président du Medef s’est exprimé « C’est inadmissible parce que cela traduit une dérive du gouvernement américain, du président américain lui-même, qui veut signifier une emprise sur l’économie mondiale et les valeurs européennes », rappelant ainsi que céder reviendrait à trahir non seulement nos valeurs, mais également les efforts entrepris depuis des années. Des efforts portés à la fois par la loi Copé-Zimmermann ou par la loi Rixain et par des entreprises convaincues que la diversité n’est pas un obstacle à la performance, mais au contraire l’une de ses conditions.

Dans un contexte où l’administration Trump affiche clairement son hostilité aux politiques DEI, allant jusqu’à exiger leur démantèlement dans les entreprises américaines elles-mêmes, le signal envoyé aux acteurs économiques européens est clair : il faudrait choisir entre les valeurs et les contrats. Pourtant, la majorité des entreprises françaises, quelles que soient leur taille ou leur exposition au marché américain, ont tenu bon et refusent de faire le moindre compromis. Elles assument une responsabilité sociale forte, et démontrent que l’on peut rester fidèle à ses valeurs.

Carrefour, par la voix de son PDG Alexandre Bompard, a réaffirmé son engagement sans ambiguïté. Même position du côté d’AXA, de BNP Paribas, ou encore d’Accor et Total , qui continuent de faire vivre leurs engagements DEI sur le terrain, sans infléchir leur cap.

Mieux encore : certaines entreprises n’ont pas seulement résisté, elles ont accéléré. Le groupe Sodexo a récemment lancé « Élan pour la diversité », un programme ambitieux visant à renforcer encore l’inclusion au sein de ses équipes. À ses côtés, des partenaires comme Orange, Sanofi, le groupe ADP…… Autant d’acteurs qui démontrent que les valeurs d’égalité, d’inclusion et de respect ne sont pas négociables et encore moins monnayables.

À ceux, de l’autre côté de l’Atlantique qui accusent la diversité de s’opposer au mérite, rappelons l’essentiel : il ne peut y avoir de véritable méritocratie sans égalité des chances. Or, ce que les politiques DEI rendent possible, c’est justement de donner à chacun, quel que soit son parcours ou son identité, les moyens d’exprimer tout son potentiel. En s’attaquant aux biais de recrutement, à l’autocensure, aux stéréotypes ou aux inégalités d’accès à l’emploi, elles offrent un terrain plus juste pour que les talents puissent émerger.

Oui, il reste du chemin à parcourir : 40 % des salariés issus de la diversité déclarent encore avoir été victimes de discriminations au travail, chiffre qui grimpe à 60 % pour les personnes en situation de handicap ou issues des minorités notamment LGBT+. Les inégalités de salaires et d’accès aux responsabilités persistent, en particulier entre hommes et femmes cadres selon un baromètre de l’Apec publié le 27 février dernier. Les inégalités des chances, en fonction de l’origine sociale et géographique sont encore une réalité présente en France rapporte de son côté l’Insee.

Mais plutôt que de renoncer, ces constats doivent nous pousser à agir davantage.

Contrairement aux États-Unis, la France s’appuie sur un cadre législatif robuste : Car nos engagements en matière de diversité et d’inclusion ne sont ni accessoires, ni opportunistes. Ils sont le fruit d’années de travail, de lois structurantes et de mobilisations internes dans les entreprises pour garantir plus de justice, d’égalité et de performance. Ce sont des valeurs inscrites dans notre ADN collectif.

Car ce qui est en jeu aujourd’hui dépasse de loin les pratiques RH. C’est la place que l’on veut donner à la justice sociale, à l’égalité réelle, à la reconnaissance des talents dans leur pluralité. C’est la vision que l’on porte de l’entreprise comme acteur de transformation.

Il ne s’agit pas de résister par principe, mais par conviction. La diversité et l’inclusion sont des fondements d’une entreprise durable, innovante et humaine. Le climat politique américain ne doit pas nous faire douter de nos propres trajectoires. Au contraire, c’est le moment de redoubler d’ambition.

La France doit continuer à défendre ses entreprises, ses valeurs, et la conviction que la richesse humaine est une force pour l’innovation, l’attractivité. Les entreprises françaises doivent être fières de porter cette vision, de la traduire dans leurs pratiques, et de refuser toute remise en cause de ces avancées.

Continuons à faire de nos entreprises des lieux d’égalité, d’inclusion et de progrès. Ensemble, et sans concession.”

Yann Tanguy – Délégué Général Les entreprises pour la Cité et Secrétaire Général de la Charte de la diversité

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